CNRS : Direction complice ou impuissante ?

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La mise en place de l’ANR, de l’AERES, de la loi LRU ont bouleversé le paysage de la recherche publique française. Les menaces qui pèsent sur l’avenir des organismes EPST, et en premier lieu, sur celui du CNRS n’ont pas suscité, de la part des ses dirigeants, de réactions à la hauteur des enjeux.

Le Centre National de la Recherche Scientifique, organisme généraliste et pluridisciplinaire de la recherche publique en France, est, depuis plusieurs mois, l’objet d’une remise en cause permanente. Il a d’abord été fragilisé dans son rôle d’opérateur de recherche, par la mise en place de l’Agence Nationale de la Recherche. Cette dernière privilégie les financements sur projets, au détriment de ceux par soutien de base en régression constante depuis plusieurs années. Cette logique, favorisant une mise en concurrence des chercheurs entre eux, mine les politiques scientifiques élaborées dans les unités.
Ensuite, sa mission d’évaluation des équipes de recherche et des chercheurs, maintenant confiée à l’Agence d’Evaluation de la Recherche et de l’Enseignement Supérieur, a marginalisé le Comité National.
La concurrence plutôt que la coopération, le court terme plutôt que la persévérance. C’est un nouveau modèle d’organisation de la recherche qui a été mis en oeuvre ces dernières années, et que SUD RECHERCHE EPST dénonce.

Mais le coup de grâce a été porté par le Président de la République Nicolas Sarkozy, dans sa lettre de mission envoyée à Valérie Pécresse, Ministre de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche, le 5 juillet 2007. Adepte de la rupture, Sarkozy en la matière impulsait plutôt une accélération du processus entamé par son prédécesseur.
Cette lettre de cadrage fixait déjà les prémices d’un rétrécissement du périmètre d’action des EPST, en plaçant les Universités au centre du dispositif de recherche national, et transformant les organismes en simple agence de moyens.
Cette initiative saluée par la Conférence des Présidents d’Université, dont certains membres ne manquent pas de déclarer que la situation « d’exception » du CNRS n’était plus, ni acceptable, ni justifiée aujourd’hui, semble plus motivée par un esprit de revanche historique sur le principal acteur de la recherche que par le souci de rendre service à cette dernière.

D’autre part, le nouveau directeur de l’Inserm, André Syrota, nommé le 17 octobre 2007, après la démission de Christian Bréchot, se voit confier, par la Ministre de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche, la mission de rassembler « l’ensemble des forces éparpillées » de la recherche française dans le domaine de la santé et du vivant. A bien des égards, cela s’apparente clairement à un dépeçage en bonne et due forme du CNRS.

Enfin, le report de la présentation du Plan Stratégique 2008-2020 en Conseil Scientifique du 12 octobre, et par conséquent de son vote en Conseil d’Administration le 18 octobre, sous le prétexte que celui-ci n’était pas conforme aux exigences du Ministère de tutelle. Pourtant ce plan avait au cours des derniers mois sérieusement revu à la baisse les ambitions du CNRS.

Mais était-ce encore trop, qu’un CNRS puisse continuer à exister ?
Dans un tel contexte, le profil bas adopté par la Présidente et le Directeur du CNRS est pour le moins affligeant. Pire, les rares déclarations de nos dirigeants, du 22 juin et du 18 octobre 2007 ne pouvaient que susciter encore plus d’inquiétudes tant celles-ci sont marquées par une totale acceptation du virage opéré par Sarkozy. Toute la sémantique y est reprise. Excellence, compétition internationale, équipes. Toute notion de laboratoire, de coopération scientifique est définitivement évacuée. Quand à la question de la gestion des personnels chercheurs et ITA, l’ambiguïté est savamment entretenue entre mise à disposition et détachement.

Le mutisme est parfois accompagné de maladresse. La déclaration du 18 octobre, est à ce titre révélatrice du peu de cas fait à l’encontre des agents CNRS, et en particulier des ITA, totalement oubliés dans cette première version. Ils retrouveront leur place dans une version rectifiée le 19 octobre.
Les agents du CNRS ne sont pas des pions au service des ambitions de certains Présidents d’Université. Les chercheurs et les ITA du CNRS sont en droit d’exiger, de la part de leurs dirigeants, un traitement digne, et d’être associés à l’avenir de leur organisme, et non pas écartés d’un processus qui serait conduit dans leur dos.

Pour le moins, la Direction devrait nous dévoiler la feuille de route que le Ministère lui a fournie.
Nous réclamons un sursaut de la part de la Direction du CNRS, et une réaction claire face aux attaques répétées contre ce dernier. Elle montrerait par là, son attachement à un organisme fort et ambitieux.

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